Témoignage

 

Un extrait de l’article écrit par le chroniqueur Boubakeur Hamidechi

Marquer une cérémonie du souvenir d’un excès de solennité cache à l’évidence un certain malaise semblable à de la mauvaise conscience qui veut que l’on s’excuse de n’avoir pas été à la hauteur de l’héritage laissé par le défunt. Mais seront-ils dans ce même état d’esprit, fait de gênes cachées, ceux qui parmi les actuels dirigeants de l’UGTA officieront ce 28 janvier au 20e anniversaire de l’assassinat d’Abdelhak Benhamouda ?

Colloque International Abdelhak BENHAMOUDA

La stature de l’homme, sa sincérité et son dévouement, son don de soi et son désintéressement dans la défense des droits des travailleurs et de la république imprègneront longtemps ses partenaires et camarades syndicalistes du monde entier. Ces organisations syndicales internationales ont répondu, en masse, présent pour honorer la mémoire de A.Benhamouda, lui rendre hommage et dénoncer le terrorisme et l’intégrisme lors du colloque organisé a Alger quelques mois après son assassinat, les six et sept décembre 1997.

Ils s’engagent à soutenir les travailleurs algériens et être leur porte-parole sur le plan international auprès de leurs gouvernements respectifs et auprès des instances internationales concernées. Aussi, ils n’oublient pas de mentionner le rôle de A.Benhamouda qui a fait « de cette organisation (UGTA) ce qu’elle est devenue, une centrale nationale forte, démocratique, pleinement consciente du rôle qu’elle doit jouer pour assurer à chaque travailleur et à chaque travailleuse ‘le pain, la paix et la liberté’. Ces efforts inlassables pour faire de notre monde un lieu plus sûr pour chacun et pour chacune, nous inspireront toujours. »

Il vous est présenté quelques passages d’interventions de certains des participants de ce colloque :

Eddy LAURIJSSEN

Confédération Internationale des Syndicats Libres

« Il est évident que je pense, ici, en premier lieu, à notre cher ami, ancien Secrétaire Général Abdelhak BENHAMOUDA dont l’assassinat brutal a choque le monde entier, loin au-delà des contours de notre mouvement syndical. Abdelhak BENHAMOUDA représentait pour l’image du syndicaliste exemplaire : humaniste, homme de grand cœur, ami fidèle dès la première minute mais, aussi, tenace dans ses convictions et négociateur dur et capable, inconditionnellement au service de la cause des travailleurs.
Sa disparition tragique est une perte pour l’ensemble de notre mouvement et nous le porterons toujours dans nos cœurs.
Et, Abdelhak n’est pas le seul martyr de l’UGTA auquel la CISL rend hommage avec le plus grand respect… »

Peter SEIDENECK

Représentant de la Confédération Européenne des Syndicats

« Cela demande un syndicalisme autonome et indépendant, intègre et unitaire. L’intégrité, le courage, la modestie, l’indépendance, la détermination et l’incorruptibilité ce sont les vertus qui doivent caractériser un tel syndicalisme.
Et, ce sont les vertus qu’incarnait Abdelhak BENHAMOUDA. Et ce sont ces vertus la qui lui ont couté la vie.
La CES a bien connu Abdelhak BENHAMOUDA. J’ai eu le privilège, l’honneur et le plaisir de l’accompagner, lui et Abdelmadjid SIDI SAID, à Strasbourg et à Bruxelles, lors de leur prise de contact avec les institutions européennes. C’était un homme ferme et aimable, convaincu et convaincant, direct. Je vous assure qu’il ne nous a pas fait de cadeaux dans nos entretiens.
Je rappelle que l’UGTA dans son histoire avait perdu pendant un temps son indépendance. C’est surtout, du au mérite de Abdelhak BENHAMOUDA si l’UGTA est aujourd’hui une organisation qui a retrouvé son esprit d’indépendance. » 

Andrew KAILEMBO

L’Organisation Régionale Africaine

« Ces paroles je l’ai dit avec la franchise du militant, la conviction du syndicaliste et la confiance de l’ami. Je dis cela tout en voulant rapporter, ici, ce que m’a déclaré, mon compagnon de lutte, mon ami, mon frère le martyr Abdelhak BENHAMOUDA. Nous étions quelques frères à débattre comme à l’accoutumée avec lui sur situation en Algérie, les perspectives de développement et la politique de l’Union Générale envers cette situation.
Le martyr répondait à nos nombreuses questions avec aisance, confiance en soi et foi en la victoire, fier qu’il était de la solidarité internationale avec l’Union Générale des Travailleurs Algériens. Après plusieurs heures de discussions, Abdelhak BENHAMOUDA, lance la célèbre expression que beaucoup d’amis algériens aiment aujourd’hui a répéter : ‘L’Algérie a peut-être perdu dix années, mais elle a gagné le siècle à venir’. »

Gérard LAROSE

Confédération des Syndicats Nationaux du Québec, Canada

« Comme président de la CSN du Québec, j’ai tenu à me déplacer pour rendre hommage à Abdelhak BENHAMOUDA qui nous a fait l’honneur de participer à notre 56eme congres quelques mois avant son assassinat. De Abdelhak BENHAMOUDA, nous avons compris que l’UGTA est l’épine dorsale de la société civile algérienne. Nous avons su qu’il voulait faire de l’UGTA une puissante force transformatrice de la société algérienne en cette période névralgique, sensible et exigeante des différents passages qu’elle souhaite faire.
Sa disparition nous a atterrés. Elle pose avec acuité la question obsédante du terrorisme et des intégrismes. Elle nous force à revoir, réviser nos moyens de mettre en place et de maintenir les conditions concrètes de l’exercice de la démocratie. »

Fernand DAOUST

Représentant de la Fédération des Travailleurs du Québec

Vice-Président aux affaires canadiennes et internationales

Fonds de Solidarité des Travailleurs du Québec (FTQ)

« C’est avec empressement que nous répondons à l’appel de l’UGTA, cette organisation qui a fait montre d’un courage et d’une détermination exceptionnels au cours de ces années de crise et de tragédie. Comment ne pas évoquer, en cet instant ces centaines de milliers de militants et de militantes qui ont payé de leur vie, leur volonté de construire un pays libre, juste et démocratique. Notre ami, le camarade Abdelhak BENHAMOUDA, est, bien sûr, au tout premier rang des personnes admirables qui hantent notre mémoire. Il nous avait rendu visite, a la FTQ et au Fond de Solidarité, au printemps 1996. Très vite, il était devenu un ami des syndicalistes québécois.
En lui rendant hommage, le président de la FTQ, Clément GODBOUT, affirmait que ‘dans une Algérie profondément meurtrie par les massacres perpétrés par les groupes intégristes, il fallait beaucoup de courage pour affirmer haut et fort la nécessité de maintenir le cap sur la démocratisation du pays…. Il imposait le respect non seulement par son courage, mais, aussi, par sa vision éclairée de la société a bâtir…. Le deuil frappe non seulement le syndicalisme algérien mais, aussi, le Mouvement Syndical Mondial, qui perd en lui l’un de ses meilleurs éléments. Quant à nous, nous perdons un ami que nous admirions et qui nous inspirait’. »

Mohamed CHARKAOUI

Union Générale des Syndicats des Travailleurs d’Egypte

« C’est, la, une preuve que l’Islam est contre le terrorisme, contre le fanatisme, contre l’assassinat d’innocents : hommes, femmes, vieillards, enfants, qu’elle qu’en soit la religion. Je citerai ici les paroles du militant martyr Abdelhak BENHAMOUDA, lorsqu’il s’interrogeait : ‘est-ce que l’Islam appelle au sabotage des usines, privant les travailleurs de leur gagne-pain, est-ce que l’Islam est contre l’enseignement lorsque le terrorisme vise la destruction des écoles ?’…. Nous ne devons pas oublier que le martyr Abdelhak BENHAMOUDA avait affirmé que le terrorisme en Algérie se situe dans le cadre des rivalités internationales pour le retour au système des colonies, même sous d’autres formes. »

Jose Antonio GALVEZ

Confédération Syndicale CCOO/UGTE, Espagne

« Je voudrais clore mon intervention par la lecture d’une lettre de notre camarade Abdelhak benhamouda TRANSMISE LE 25 JANVIER 1995.
‘ La Centrale Syndicale UGTA, en tant qu’organisation indépendante du pouvoir et des partis, n’a jamais ménagé ses efforts dans intransigeante mission de défense des intérêts matériels et moraux des travailleurs algériens malgré la conjoncture extrêmement grave que traverse le pays et qui rend plus difficile sa mission.
La recrudescence et la et la multiplication des assassinats de syndicalistes et de travailleurs ont atteint un niveau intolérable et insupportable.
Cette situation exige une solidarité internationale avec les luttes et la résistance des travailleurs algériens. En conséquence, nous faisons appel à votre esprit de solidarité pour une condamnation des crimes perpétrés par les groupes armés islamistes, tout comme nous condamnons leur allies et tous ceux qui justifient leurs actes criminels ou leur assurent une couverture politique quelle que soit sa nature.
Aussi, nous vous demandons d’entamer, sous les formes que vous jugerez les plus appropriées, une action internationale entre les gouvernements et les organisations syndicales solidaires du peuple et des travailleurs algériens, une opération de rejet ferme et solennelle, des groupes terroristes’.
Le message légué par BENHAMOUDA doit susciter l’engagement du mouvement syndical international pour une solidarité avec l’Algérie. 

Michel CARON

Confédération Française Démocratique du Travail

« Par notre présence, nous entendons, bien sûr, marquer notre engagement contre le terrorisme et pour les libertés. Nous voulons aussi renouveler, devant vous, l’hommage de Nicole NOTAT et de toute la CFDT a notre frère Abdelhak BENHAMOUDA, ici, à Alger, en janvier dernier.
Nous n’oublierons jamais la formidable ovation qu’il avait reçu à notre dernier congrès. C’était le salut des militants de la CFDT a un porteur d’espoir et a un combattant de la liberté a un syndicaliste de l’honneur et de la dignité. » 

Alphonse VERONESE

Confédération Générale du Travail

« Nous pensons à toi, Abdelhak BENHAMOUDA, mon ami et mon frère, qui a su éclairer et entrainer les travailleurs et le peuple algériens dans la résistance contre l’obscurantisme, le fanatisme et la montée d’une forme de fascisme.
Nous nous refusons d’exonérer l’intégrisme quelque responsabilité que ce soit. Nous récusons avec la plus grande fermeté les campagnes de ceux qui cherchent à mettre un signe égal entre les différentes parties. »

Ibrahim HAIDER

Union Générale des Travailleurs de Palestine

« Je suis arrivé triste en Algérie car je ne retrouverai pas mon frère et compagnon de route, le martyr Abdelhak BENHAMOUDA.
C’était un vaillant cavalier, syndicaliste, Algérien, arabe, universel dont nul ne peut blâmer sa droiture.
Il était boumediéniste jusqu’à la moelle, démocrate, modeste, constant dans sa défense des droits et des libertés syndicales, convaincu de l’indépendance du mouvement syndical arabe des gouvernements arabes.
La main sale de la trahison s’est allongée et l’a assassiné en toute bassesse et abjection. Il a affronté ces lâches avec courage ; il est mort debout sans se plier. C’est, la, la volonté et la foi des révolutionnaires algériens.
Je suis devant vous, aujourd’hui, pour exprimer mon estime aux travailleurs algériens car il y’a, en vous, des milliers de Abdelhak BENHAMOUDA. Je me rappelle du jour où j’étais avec lui lors d’une tournée de la région de Laghouat.
Il disait :’ je suis confiant pour l’Union, fille de la glorieuse révolution, car il y a en vous des hommes qui ignorent la peur’. Après cela, je l’ai rencontré au Caire et je lui ai dit :
Abdelhak, je crois que ta vie est en danger. Il me répondit :’l’Algérie est tout pour moi, elle mérite que je sacrifie ma vie pour elle, c’est la maison qui nous abritera et nous réunira tous.’ Il était aussi tranchant qu’un sabre dans sa défense de la Palestine. »

Yvon QUINTIN

Organisation Internationale de l’Energie et des Mines (OIEM)

« Comme des milliers d’autres de ses frères et sœurs algériens, notre camarade Abdelhak a été assassine par les intégristes religieux assoiffés de pouvoir et de sang qu’ils en perdent toute trace d’humanité. Leurs actes sont la négation même de l’Islam fondateur du monde arabe et de sa culture musulmane. L’Islam, c’est autre chose que les crimes et le sang : l’Islam, c’est le berceau de nos civilisations.
En supprimant le Secrétaire Général de l’UGTA, ils ont tenté de démontrer au peuple algérien que personne n’était hors de portée de leur haine et qu’il ne reste d’autre choix que de se plier à leurs volontés.
Abdelhak BENHAMOUDA a, depuis le début, rejeté ce dictat infâme avec, la plus grande vigueur. Il savait faire partager sa conviction que le peuple algérien n’est pas condamne à l’islamisme, pas plus qu’il n’est condamné à la terrible politique d’austérité menée par le pouvoir sur injonction du FMI. »

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