Début 94, Confrontation UGTA/Gouvernement…
L’année 1994 s’annonçait tumultueuse pour les travailleurs algériens, et leur secrétaire général. Durant cette dernière année de son 1er mandat à la tête de l’UGTA, A. Benhamouda allait, encore une fois, se retrouver sur plusieurs plans ; politique et social. A la veille de la Conférence Nationale certains estimaient que le SG de l’UGTA faisait trop de politique, lui reprochant ses intransigeantes prises de positions éradicatrices. Beaucoup redoutaient la fin de son mandat ; allait-il se présenter pour un deuxième ? ou bien, et surtout, allait-il quitter le syndicalisme pour s’investir totalement dans la politique. Cette appréhension était d’autant plus grande que A. Benhamouda bénéficiait à coup sûr du soutien des grands pôles industriels, et de la quasi-majorité de la base syndicale. Perspectives dramatique pour les rentiers de la centrale, et les nostalgiques de l’article 120. (Liberté 03 Janvier 1994)
Benhamouda parlait ouvertement de manœuvres visant à déstabiliser l’UGTA
certains partis s’attaquent continuellement à l’UGTA et à Benhamouda en particulier. Ils disent, par journaux interposés, que Benhamouda a dévié l’UGTA de sa voie, qu’il fait beaucoup de politique … Je réponds en disant qu’à l’UGTA, on ne peut pas voir des usines, des établissements scolaires, des moyens de transport, bruler et applaudir, ça c’est l’outil de travail et donc des postes de travail qui s’en vont en fumée ; la déviation, ça serait de se taire et d’accepter cela.
A. Benhamouda expliquait ainsi qu’au moment où des gens se taisaient ou justifiaient le sabotage économique, la centrale syndicale jugeait de son devoir d’expliquer aux travailleurs la gravité de la situation et de les sensibiliser (Le Matin 29/04/94).
Par les prises de position l’UGTA attaque indirectement pas mal de partis qui, eux, sont en train de justifier le sabotage économique. Nos attaques mettent ces gens dans le banc des accusés, alors ils veulent renverser les rôles en m’accusant de faire de la politique. Je ne suis pas un politicard comme certains, ceux qui profitent de la situation. Moi, je ne tire pas les ficelles, je ne profite pas de la situation, au contraire j’assume, je subis et je paye la facture… l’UGTA reste une force réelle qui influe sur le cours des évènements dans le pays. Si l’UGTA faisait de la politique politicienne, elle ne serait pas arrivée à augmenter le SNMG cinq fois, elle n’aurait pas réussi à augmenter les allocations familiales de 500%. Il faut dire aussi que nous avons révisé et augmenter pas mal d’indemnités, nous en avons créé de nouvelles : salaire unique, prime de la femme au foyer… nous avons récupéré la sécurité sociale, la caisse de retraite, nous avons créé la caisse de la retraite anticipée, l’assurance chômage… Si c’est cela faire de la politique, alors oui nous faisons de la politique… » Le Matin 29/04/94.
1994 débuta avec une rencontre UGTA- Gouvernement Redha Malek, une semaine après l’adoption par le conseil des ministres de la loi de finances pour l’année 1994 et à la veille des négociations avec le FMI sur le profilage multilatéral. l’UGTA avait durci le ton en remettant sur le tapis ses principales revendications. Dans une déclaration rendue publique le 21 Décembre 1993 le secrétariat general de l’UGTA avait précisé que la Centrale se positionnait contre tout ce qui pouvait conduire au rééchelonnement, « même sous couvert d’appellations, de concepts et de formules visant les mêmes objectifs ». (Liberté 03 Janvier 1994). Dans une interview accordée au quotidien arabe El-Massa, A. Benhamouda avait indiqué que les discussions avec les institutions internationales devaient avoir lieu avec un « négociateur algérien qui ait le soutien du peuple », et faisait part de son refus d’un dialogue débouchant sur « l’hypothèque de l’avenir du pays ».
Huit heures et demie de négociations entre le gouvernement et l’UGTA n’aboutirent à aucun résultat concret, hormis les quelques petites concessions du gouvernement en direction des travailleurs du secteur de l’éducation prévenant ainsi une grève illimitée. Le désaccord sur les autres dossiers en litige restait total. RT 10/01/94
Pour preuve, le communiqué publié le lendemain par le secrétariat national de l’UGTA, ne laissait aucune équivoque et s’annonçait comme un véritable ultimatum, accordant au gouvernement « un délai ne dépassant pas le 15 Janvier pour une réponse effective et précise à l’ensemble des revendications… ».
Ces revendications étaient claires, avec explications et arguments à l’appui :
- Relèvement du SNMG de 2500 à 4000 DA.
- Création d’une caisse d’allocation chômage.
- Approvisionnement régulier en produits de large consommation et stabilité de leur prix.
- Préservation de l’emploi.
- Prise en charge du dossier EPL.
- Retraite proportionnelle.
- Prise en charge des revendications des travailleurs de l’éducation.
- Révision du statut de la Fonction publique.
- Réorganisation de l’économie nationale et maitrise des dépenses en devise fortes.
- Soutien au secteur BTP pour résorber le chômage et réalisation du logement social.
- Versement de la quote-part de l’Etat due à la Caisse de sécurité Sociale.
- Engagement de l’Etat à verser les arriérés des montants des œuvres sociales, soit 2000 milliards de centimes.
- Engagement de l’état à appliquer une politique dissuasive de lutte contre l’évasion fiscale, et bien d’autres revendications, telle la question des vexations et de l’arbitraire dont sont victimes les cadres syndicaux dans certaines entreprises et administrations.
La Centrale s’attendait à des réponses précises et claires à toutes ces revendications, étant donné que la plate-forme avait préalablement été adressée au gouvernement « disposant » d’un délai suffisant pour y donner suite. Ce dernier était venu avec des réponses générales exprimant uniquement sa disponibilité à discuter toutes les questions posées et à créer, à cet effet, des groupes de travail.
Surpris par l’issue de la rencontre, A. Benhamouda ne manqua pas de montrer son étonnement au chef du gouvernement, et cela dans les termes les plus fermes :
… non seulement vous êtes incapables de contrôler le marché ; le sucre, la semoule, l’huile et le lait importés, face à la contrebande aux frontières. Non seulement vous fermez l’œil devant le privé qui ne paie pas ses impôts, vous comptez augmenter les prix et vous voulez que nous restions silencieux et inactifs ! Pour votre gouverne, sachez que nombre de secteurs vont incessamment réclamer une augmentation des salaires et ce, bien avant votre annonce d’augmentation des prix ! Si vous augmentez les prix, la demande d’augmentation des salaires sera globale et généralisée.
Espérant disposer d’une période de réflexion, pour permettre aux commissions installées d’étudier les thèmes proposés, le chef du gouvernement a buté sur l’intransigeance du SG de l’UGTA, qui n’était pas disposé à « sacrifier les droits des travailleurs » annonçant ainsi un ultimatum au gouvernement : « je vous dis que vous avez un délai jusqu’au 15 Janvier. Pas plus. Au-delà de cette date, je ne garantis plus rien. ». RT 10/01/94
En interpellant le gouvernement, l’UGTA cherchait ainsi à obtenir un engagement ferme avant la fin de mandat du HCE et l’entrée dans la période de transition. La centrale syndicale renouvelait des revendications soumises successivement à quatre gouvernements et trois chefs d’états. C’était aussi une manière pour l’UGTA d’être présente dans les négociations avec le FMI dont l’issue décisive était annoncée pour les jours suivant. Alger Républicain 16/01/94
Ces négociations UGTA-Gouvernement se sont finalement soldées par un accord important. A l’issue d’une 2eme rencontre le 17 Janvier 1994, ou il a été convenu de :
- Augmenter le salaire minimum garanti (SNMG) de 2500 DA/mois a 4000 DA/mois.
- Indexer le seuil des pensions de retraite à raison de 75% du SNMG soit a 3000 DA/mois en relation avec l’augmentation du SNMG a 4000 DZ/mois.
- Supprimer la notion de salaire minimum d’activité introduite par la circulaire ministérielle No 15 du 19 Novembre 1990 et du même coup geler et supprimer toute indexation de rémunération, primes ou indemnités précédemment pratiquée sur la base du SNMA.
- Préciser par voie légale le contenu et les rôles du SNMG.
- Mettre en place les instruments réglementaires et veiller à l’expédition des procédures conventionnelles en vigueur pour qu’une augmentation globale de tous les salariés d’un montant uniforme de 500 DA/mois du salaire y compris les primes et indemnités et avant application de l’IRG et de prélèvement de sécurité sociale, soit effective dès le mois d’avril 1994, avec effet rétroactif au 1er Janvier 1994.
- A l’effet de renforcer les solidarités entre les salaries :
- Instituer un régime de retraite anticipée en faveur des salaries de 50 ans et plus et qui risquent de perdre leur emploi pour raison économique dans le cadre d’une compression d’effectif ou d’une cessation d’activité de l’organisme employeur.
- S’assurer le financement des dispositifs d’assurance-chômage en faveur de tous les salariés ayant fait l’objet d’un licenciement dans le cadre d’une compression d’effectif ou en raison d’une cessation d’activité de l’organisme employeur.
- Assurer le financement des dispositifs d’assurance-chômage et de retraite anticipée par les employeurs et les salariés avec un concours initial de l’état, dans les conditions devant garantir à tout moment l’équilibre de chacun de ces régimes.
- Créer un fond national des œuvres sociales par affectation de 0.5% du taux de cotisation au budget des œuvres sociales en faveur de la promotion du logement social à destination des salariés dont les modalités d’administration et gestion seront précisées par un texte règlementaire pris après consultation et accord avec l’UGTA.
- Pour finaliser le dossier relatif aux entreprises publiques locales (EPL) les deux parties ont convenues de réunir la commission nationale instituée en 1993 dans le cadre des discussions gouvernement-UGTA en vue d’approuver après amendements éventuels le dossier préparé par le comité opérationnel ad hoc institué dans le même cadre.
- Concernant les dossiers relatifs aux politiques publiques (des salaires et des prix, de la préservation et promotion de l’emploi, de la réorganisation et redynamisation du secteur public économique, de l’amélioration de l’encadrement juridique des relations de travail, de la protection sociale) il a été convenu de relancer les groupes de travail mixtes institués a cet effet selon un calendrier d’achèvement de préparation et de discussions dont l’échéance est fixée pour la fin du 1er semestre 1994.
- La conclusion à bref délai entre les ministres de l’Education nationale et la Fédération nationale des travailleurs de l’Education d’un accord sur les produits relatifs à la mise en place de la commission nationale des œuvres sociales à la régularisation de la situation des travailleurs en maladies professionnelles et des journées de grèves.
- Mettre en place un groupe de travail mixte ministère de ‘Education nationale/Fédération des travailleurs de l’Education chargé de la formulation de propositions de révision des statuts particuliers des travailleurs de l’Education.
- Mise en place d’un cadre adéquat permettant le suivi en commun de l’application du présent accord, des conventions et accords collectifs de travail.
Scans of Procès-Verbal d’Accord Gouvernement/UGTA Janvier 1994
« Les institutions Internationales doivent savoir que ce n’est pas la délégation officielle allant négocier avec le F.M.I qui décident, il y’a tout un peuple et des organisations ». A. Benhamouda.
Tout au long de son parcours syndical, A. Benhamouda n’avait jamais cessé de faire parler de lui. Malheureusement, souvent il était l’objet de campagnes abjectes qui essayaient de dérouter l’opinion publique, et camoufler le malaise de ceux qui le considérait leur ennemi ; qui étaient réellement eux-mêmes les ennemis de l’Algérie. A. Benhamouda, n’attachait pas une grande importance à ces attaques, ses actions parlaient pour lui, mais des fois, il répondait quand il voyait qu’on essayait de tromper le peuple et les travailleurs sur des sujets sérieux. Tel a été le cas à la suite d’une couverture peu objective (pour ne pas dire mensongère) des medias publics, à leur tête l’APS et la télévision, d’une réunion tenue par le SG de l’UGTA avec les Fédérations nationales le Mardi 1er Février 1994. Des medias avaient donc reportés que A. Benhamouda était d’accord pour une dévaluation du dinar.
Il faut rappeler qu’à l’époque le gouvernement algérien était en pleine négociations avec le FMI et que la voie préconisée par le ministre de l’économie et évidemment par le gouvernement Redha Malek, exigeait une dévaluation de l’ordre de 50% de la monnaie nationale pour éponger les surliquidités à l’origine d’une inflation de 30% en 1993. Le FMI réclamait, en plus, une plus grande ouverture du marché algérien et des taux d’intérêts plus élevés pour les entreprises. Une exigence qui allait se traduire par des dizaines de milliers de licenciements.
Donc, lorsque l’agence de presse nationale annonce aux algériens que A. Benhamouda accepte cette voie, cela avait beaucoup d’implications.
La mise au point de A. Benhamouda n’a pas tardé, dans un communiqué paru le 3 février la Centrale Syndicale précise
qu’a aucun moment et en aucune façon, l’UGTA ne soutient l’Exécutif quant aux mesures qu’il a annoncées, notamment en ce qui concerne la dévaluation du dinar, la compression des effectifs et l’augmentation des prix des produits jusque-là soutenus ».
En effet, A. Benhamouda n’avait jamais donné son consentement quant à la dévaluation du dinar. Il avait, par contre, déclaré que cette mesure était une solution de facilité et qu’il appartenait au gouvernement de faire publiquement connaitre comment il entendait faire face aux conséquences dramatiques de cette option. Il avait aussi clairement averti que l’UGTA entrerait dans un affrontement général avec le gouvernement dans le cas où certains de ses ministres, notamment ceux du Travail, de l’Economie, du Budget et de l’Education nationale persistaient dans leurs déclarations et leurs comportements inadmissibles à l’encontre de la Centrale syndicale. Le Matin 03/02/94
Concernant le rééchelonnement de la dette algérienne et les négociations du gouvernement algérien avec le FMI, la position du SG de l’UGTA était claire,
… Il faut que le gouvernement définisse ce qu’il veut. C’est à partir de là que nous pourrons juger de la finalité de ces négociations. Nous avons demandé à ce que les négociations ne portent pas seulement sur l’endettement, mais sur tout. La dette est partie intégrante du programme qu’il faut justement arrêter…Ceci d’ailleurs nous l’avons déjà fait savoir auparavant. A défaut de présenter notre propre programme, nous nous verrions imposer celui du FMI dans ces conditions. Extrait d’une interview accordée au quotidien Horizons 06/03/94.
- Benhamouda s’était toujours prononcé contre le rééchelonnement de la dette extérieure de l’Algérie
Parce que nous pensons que le rééchelonnement est un piège. Il suffit de regarder autour de nous… prenez l’exemple du Maroc. En 1982-1983, sa dette était de 13 milliards de dollars. Il a demandé un rééchelonnement. Résultat : sa dette s’élève aujourd’hui à 26 milliards et il demande un deuxième rééchelonnement. Entre-temps, le nombre de ses chômeurs a doublé, pour atteindre 4 millions. Nous ne voulons pas, nous, que nos chômeurs doublent avec le rééchelonnement. L’Algérie qui a toujours payé ses dettes rubis sur l’ongle, a droit à une certaine compréhension de la part de ses créanciers. C’est aussi leur intérêt : si l’Algérie coule, c’est tout le Maghreb qui sera menacé et nos partenaires européens seront les premiers perdants. Ils doivent tenir compte de cela dans les négociations. Il ne faut pas gérer le problème du seul point de vue financier, mais aussi économique, politique et social ». Extrait d’un entretien accordé à l’envoyé spécial de l’Humanité, l’article complet peut être lu ici link to Alger Républicain 14/02/94
L’année 1994 était la dernière année du mandat de A. Benhamouda à la tête de l’UGTA, et elle s’annonçait très chaude. Il n’avait cependant jamais perdu de vue les objectifs et les buts qu’il s’était tracé depuis son élection à la tête de la centrale syndicale :
Le plus important : l’Amour de l’Algérie, en ces termes il avait commencé son entretien avec Alger Républicain paru le 15/02/1994. « La première des choses que l’UGTA demande c’est un bilan. Chez nous des personnes gèrent et s’en vont et personne ne rend des comptes. C’est catastrophique… les affaires de l’état sont gérées dans la rue.
…je démissionne après le prochain congrès. Moi, je défends la continuité et la reconduction du capital expérience. Je ne renouvelle pas ma candidature, cela aussi est une forme de rupture. …. Il faut qu’une nouvelle race de syndicalistes arrive. Il ne faut pas que l’UGTA soit liée à un homme. Moi, je vais au congrès dans l’espoir d’affronter le syndicaliste pur et dur et ce n’est qu’à ce moment-là qu’on pourrait parler de renouveau. »
En plus des négociations et affrontements, Gouvernement/UGTA, en plus de la situation économique catastrophique, des pressions du FMI, de la situation sécuritaire encore plus catastrophique, l’année débutait avec beaucoup d’incertitudes pour les travailleurs. Un nouveau président, encore un nouveau premier ministre et gouvernement, et peut être un nouveau SG de l’UGTA en fin d’année. La seule constante était la détermination de A. Benhamouda de mener à bien ses travaux jusqu’à la tenue du 9eme congrès, qu’il voulait être le plus transparent et le plus démocratique qui ait jamais été organisé par la centrale syndicale.
Liamine Zeroual, nouveau chef d’état…
De Mouloud Hamrouche à Redha Malek, l’UGTA s’était toujours imposé comme partenaire social incontournable. Au lendemain de son investiture, le président de l’état Liamine Zeroual fait de sa première sortie officielle une visite à la Maison du peuple.
Liamine Zeroual avait choisi de participer, avec les travailleurs, à la célébration du 24 février, le trente-huitième anniversaire de l’organisation syndicale, en se rendant donc chez les travailleurs, le président semblait avoir fait le choix de renouer ainsi avec la tradition consacrée par Boumediene, poursuivie par Boudiaf après son abandon par Chadli.
Nous ne sommes pas des parvenus, nous avons notre Histoire », en s’exclamant ainsi le 24 Février, date anniversaire de la création de la Centrale Syndical, le SG de l’UGTA tenait à remettre les pendules à l’heure en présence du président de l’Etat, M. Liamine Zeroual. Dans un entretien accordé au quotidien l’Horizon, il revient encore sur les questions de l’heure ; la visite de Camdessus, SG du FMI, à Alger, et la dévaluation du Dinar : « … l’expérience a démontré que jusque-là, il n y a pas eu de réformes profondes. Car personne ne s’oppose à des réformes réelles. Depuis 87, il y a seulement du bricolage, bien au contraire, on a cassé l’appareil économique. Aussi, il faut le réparer… la dévaluation du dinar a commencé avec le gouvernement Hamrouche. Elle est au nombre de 5. En fin de compte elle n’a pas eu les effets escomptés. Aussi, il faut surtout se poser la question de savoir pourquoi notre monnaie est faible. La faiblesse de la productivité en est la réponse notamment depuis 87. Comment rentabiliser notre économie si la productivité reste faible, la monnaie y est liée directement … Actuellement le débat n’est pas canalisé, on veut gérer l’économie comme on a géré la politique en 89-90. C’est-à-dire dans la rue. Le débat signifie que l’on apporte des critiques, des contrepropositions, sur la base d’un programme. Si l’on prend par exemple les négociations Gouvernement UGTA, celles-ci se déroulent sur la base d’un cahier de revendications. C’est ça notre programme. C’est ça l’expérience. Or, si on va négocier avec le FMI, sans pouvoir s’appuyer sur un programme, on ne peut échapper à ses conditionnalités. En revanche, dans le cas contraire, il est possible de mieux se défendre. » L’article complet peut être lu ici. Horizons 06/03/94
Benhamouda trouvait toujours à redire sur le cours des négociations avec le FMI, sur le fond et sur la forme. Le manque de transparence de la part du gouvernement et la non implication des partenaires sociaux, en particulier l’UGTA, conféraient a ces négociations des aspects de complot. Le SG de l’UGTA ne mâchait pas ses mots la dessus : « Mais bien sûr qu’elles manquent de transparence, toutefois, nous avons la possibilité de nous informer aux sources mêmes. Néanmoins, nous ne pouvons diffuser des informations officielles.
La délégation officielle qui négocie actuellement avec le FMI engage l’Etat algérien avec les institutions financières internationales et donc doit avoir l’appui de tous. Car nous autres, nous ne pouvons soutenir quelque chose que nous ignorons. L’adhésion suppose la connaissance. Or les partenaires sociaux ne connaissent rien de ces discussions. » Horizons 06/03/94
Du 22 Mars 1993 au 22 Mars 1994…
Le 22 Mars, jour anniversaire de la marche historique du peuple algérien contre le terrorisme barbare conduite par l’UGTA, celle-ci affirmant de nouveau son engagement à agir pour mettre ses actes en accord avec sa ligne de conduite patriotique et nationaliste, elle décrète la journée du 22 mars 1994, journée de deuil national. Un appel solennel pour un arrêt de travail avait suivi cette déclaration, celui-ci met l’accent sur
… le refus, du moins l’incapacité et l’inaptitude de l’état a agir de manière efficace, résolue et permanente pour mettre définitivement un terme au génocide programmé du peuple algérien … Tout est entrepris, consciemment ou par manque de discernement, pour conduire l’Algérie au chaos et à la guerre civile». la déclaration parlait clairement de l’existence de traitres au sein du pouvoir « Il existe au sein du Pouvoir et de la classe politique algérienne des hommes et des forces qui travaillent au pourrissement encore plus grave de la situation, par un silence ouvertement complice, par un attentisme ou une démission assimilables à une vraie trahison nationale, et par des reculs, des concessions et des compromissions qui n’obtiendront jamais l’aval du peuple algérien ». La Nation du 23 au 29 Mars 1994.
Par concession et compromission, on peut bien sûr deviner que l’UGTA parlait du blanchiment des terroristes à travers les négociations et la réconciliation que certains voulaient, pour dissimuler les traces de leurs actions, afin que la vérité ne se sache pas, et que la justice ne se fasse pas.
L’appel de l’UGTA a été suivi par la quasi-totalité des travailleurs, le pays était paralysé, ce fut le plus grand cri de colère des travailleurs face à l’inaction du gouvernement et de toute la classe politique devant le drame que vivait le peuple algérien.
Contrairement à l’accoutumé, le 1er Mai 1994, A. Benhamouda choisira de le célébrer hors capitale, à Annaba. Il explique au Matin (19/04/94) les raisons de ce choix : « après le 8eme congrès nous avons voulu introduire des nouveautés dans tous les domaines de la lutte syndicale afin d’effectuer des changements dans les méthodes, les programmes, les structures, sur la plan organique et organisationnel… et c’est la même chose pour ces festivités.
Le problème pour nous ce n’est pas uniquement de décentraliser. Nous avions fait une première en organisant la réunion de la Commission exécutive national (CEN) à Oran. Ce sera aussi une première d’organiser les festivités du premier Mai à Annaba. C’est une ville industrielle où il y a un nombre important de travailleurs qu’il faut aussi habituer aux grands bains de foule qui ne s’organisent traditionnellement que dans la capitale. Nous voulons en fait capitaliser une expérience, en familiarisant notre base, dans toutes les villes du pays, à ce genre de manifestations, en prévision des rencontres internationales que ne manquera pas d’organiser l’UGTA, et il faut que nos structures, à travers tout le territoire soient préparées. »
La marche de la honte …
Au moment où l’UGTA préparait donc les célébrations du 1er Mai, journée Internationale du travail, d’autres voulait utiliser cette date symbolique pour impliquer les travailleurs dans une marche pour le soutien du dialogue avec les terroristes, chose qu’A. Benhamouda et l’UGTA refusait catégoriquement « Tous les Algériens sont pour le dialogue, mais pas de dialogue avec les assassins. L’UGTA dialogue bien avec le gouvernement, alors qu’elle ne s’entend pas avec lui. Nous ne sommes pas contre le dialogue, mais encore faut-il savoir avec qui on le fait. » A. Benhamouda dans un entretien accordé à l’Hebdo Libéré parution du 27 au 03/05/94. Le FLN et l’ONEC (Organisation des Enfants des Chouhada) voulait mener cette marche de la honte, qui était soutenue par certains cercles du pouvoir de l’époque.
Cette marche sera bien vite avortée, car les travailleurs étaient conscients des complots qui se tissaient autour d’eux et avaient fait comprendre à ceux qui voulaient bien comprendre que leur organisation ne se laisserait pas marcher sur les pieds.
- Benhamouda avait signifié le refus de l’UGTA de participer aux différentes marches préparées et avait déclaré qu’à son sens, « elles visaient des objectifs politiques étroits enrobés de dates historiques … Lorsque nous avons voulu marcher pour le salut de l’Algérie nous avons choisi le 22 mars et nous en avons fait une date mémorable». Le Matin 19/04/94
Cette marche a du donc être reportée par ses organisateurs, tous les travailleurs étaient occupés à célébrer le 1er Mai avec leur syndicat. Le 8 Mai était la nouvelle date proposée, mais ce fut un fiasco total. A une question du Soir d’Algérie sur les raisons de la désaffection des citoyens vis-à-vis de cette marche, A. Benhamouda répondit :
l’UGTA n’était pas concernée par cette marche…… Nous avons préféré adopter une position de neutralité tout en ne nous opposant pas à une participation à titre individuel de nos militants. En toute modestie, si nous n’avons pas vu une large participation c’est parce que tout simplement le poids important de la centrale était absent ce jour-là…. Malheureusement, ils (les travailleurs) n’ont pas trouvé des slogans qui condamnent le sabotage économique sans parler du terrorisme. Or, la préservation de l’outil de travail est un souci permanent chez le travailleur. Sans soulever le problème des moyens de transport qui sont brulés ou des établissements scolaires qui subissent le même sort….Comment voulez-vous dans ce cas que le travailleur se sente concerné par cette marche ? Alors je dis à ceux qui ne veulent pas digérer leur fiasco, y en a marre à chaque fois de vouloir transférer leur échec sur le dos de l’UGTA… » Le Soir d’Algérie 12/05/94.
Première rencontre avec le gouvernement Sifi
Le 26 Juin 1994, une réunion de travail regroupant les membres du gouvernement sous la conduite de Mokdad Sifi et le secrétariat national de l’UGTA dirigé par A. Benhamouda s’est tenue en vue d’examiner l’ensemble des préoccupations du monde du travail.
Le Secrétaire général de l’UGTA avait établi un constat de la situation qui prévalait au niveau des différents secteurs d’activités et fait état des grandes préoccupations et difficultés des travailleurs. La Commission Exécutive Nationale (CEN) de l’UGTA s’était réunie au préalable pour sa 7eme session et avait adopté une déclaration dans laquelle elle soulignait que le rééchelonnement était un choix politique qui allait conduire inéluctablement à une soumission pure et simple de l’Algérie au Club de Paris. Ceci signifiait, par la même, le retour déguisé du colonialisme avec, pour corollaire, l’abandon de la souveraineté du pays et de l’indépendance de la décision nationale.
La déclaration précisait que les effets dévastateurs du rééchelonnement frapperaient en premier lieu, sinon exclusivement, les catégories sociales démunies et déshéritées, comme l’avait démontré l’expérience des pays du Tiers-Monde ayant emprunté cette voie aventureuse. Elle estimait qu’au court ou moyen terme, les conditions draconiennes accompagnant le rééchelonnement déstructureraient l’économie nationale et marginaliseraient les capacités du pays, dans le sens où l’Algérie perdra son statut de pays productif pour se transformer en vaste marché de consommation des biens et services des multinationales.
Par ailleurs, la déclaration précisait que la CEN enregistrait avec une extrême gravité la dégradation du pouvoir d’achat des travailleurs à la suite des mesures gouvernementales successives portant hausse des prix, dévaluation du dinar, absence des institutions, des organes et des services de l’Etat en matière de régulation, d’organisation et de contrôle du marché et des prix. Du fait de cette politique gouvernementale, les travailleurs se trouvaient désormais à la merci des groupes mafieux et des barrons qui avaient fait main basse sur le commerce national, tout en gérant sur une plus grande échelle les actions de contrebande et de spéculation.
Par conséquent, et afin de contrer tous ces effets néfastes et ces perspectives négatives auxquelles l’Algérie et les travailleurs Algériens étaient confrontés, la Centrale syndicale présenta au gouvernement une nouvelle plate-forme de revendications articulée autour des axes suivants : le pouvoir d’achat des travailleurs ; les systèmes de rémunération en vigueur ; l’assainissement et la réorganisation de l’économie nationale en vue de la relance économique ; l’adaptation de la formation professionnelle à l’emploi ; et enfin le logement social et l’emploi.
A l’issue des débats il a été décidé le relèvement, à compter du 1er Octobre 1994, des allocations familiales, de 200 DA par enfant et par mois a 300 DA, le relèvement de la prime de scolarité de 250 DA a 400 DA par enfant scolarisé, l’installation de groupes de travail mixtes (UGTA-Gouvernement) chargés d’approfondir la réflexion et de formuler des propositions sur les thèmes suivants : pouvoir d’achat (salaires et prix) ; réforme de l’administration et du statut général de la fonction publique ; préservation et promotion de l’emploi, réorganisation et dynamisation du secteur public ; encadrement juridique des relations de travail et protection sociale.
Le principe et la décision d’augmenter les salaires étaient acquis ; en septembre, les deux parties allaient se revoir pour négocier, dans le fond, la revalorisation des salaires dans tous les secteurs.
Cette question, ainsi que celle liée au 9eme congrès de l’UGTA dont la date venait d’être fixée par la Commission Exécutive Nationale et qui allait avoir lieu les 27, 28 et 29 Décembre 1994, ont été abordées dans un entretien de A. Benhamouda avec l’hebdomadaire Alger Républicain (05/11.07.94) dont ci-dessous un extrait :
Alger Républicain : peut-on connaitre le contenu de la plateforme de revendications remise au gouvernement ?
- Benhamouda : on peut la résumer en trois axes. Le premier axe englobe les salaires et les prix ; le deuxième axe concerne la protection sociale d’une manière générale, sécurité sociale, la caisse de retraite, l’assurance-chômage, la retraite anticipée, le transport, l’habitat, la scolarité… le troisième volet est le plus important, c’est celui du dossier économique. Pour nous, avant de parler de restructuration, il faut parler de réorganisation de l’économie. Les deux aspects sont indissociables. Il ne faut pas dévier du débat sur la crise économique en parlant uniquement de privatisation. Pour nous la privatisation doit être située dans un modèle. Il faut d’abord définir les secteurs stratégiques, ceux qui méritent la protection. Et il y’a mille et une manière de protéger l’économie à travers la fiscalité, les taxes douanières… d’un autre coté il faut définir le rôle de l’état, des salaries, du citoyen…
Alger Républicain : des membres de la CEN ont demandé le report du congrès, vu la situation sécuritaire…
- Benhamouda : ce n’est pas un problème de peur… Le problème est plus profond. Ils disent qu’en principe, un congrès, ce sont des débats autour de l’organisation syndicale, pour évaluer, faire un bilan, faire ressortir les aspects positifs et négatifs pour améliorer le travail par la réflexion, aborder les problèmes socio-professionnels, les problèmes économiques.
Dans cette situation, certains syndicalistes pensent que les travailleurs ne sont pas psychologiquement prêts à débattre de certaines questions…
De plus, dans les wilayas où il y a le couvre-feu, l’activité syndicale qui doit avoir lieu après les heures de travail est gênée. Mais il nous faut tenir le congrès, parce qu’il faut une légitimité à ceux qui dirigent l’action syndicale.
…..Personnellement, j’ai été accusé d’être l’ennemi des politiques. En fait, il n’y a pas de classe politique. Les responsables de ce vide sont les barons de l’ancien système et ils se préparent à revenir avec leurs pions.
Rentrée sociale : « Nous ne sommes pas des parvenus, nous avons notre histoire »
En vue de conjurer les efforts visant à amortir le choc social dans le secteur du travail, les six commissions mixtes gouvernement-UGTA composés des responsables des différents ministères et des secrétaires nationaux de l’UGTA, avaient toute la période d’été pour se concerter et être fins prêts pour la rentrée sociale. Le 12/09/1994, une première séance de travail eu lieu au Palais du Gouvernement à laquelle avaient pris part des membres du gouvernement sous la conduite de M. Sifi et des membres du secrétariat national de l’UGTA, dirigés par A. Benhamouda. L’objet de cette rencontre portait sur l’évaluation de l’état d’avancement des travaux des groupes mixtes UGTA-Gouvernement, ainsi que sur la préparation de la rencontre dans le cadre de la tripartite à laquelle avait appelé A. Benhamouda durant les travaux de la CEN.
A l’issue des débats il avait été convenu :
- d’accélérer les travaux des six groupes mixtes, dont les conclusions devaient être présentées avant la tenue de la prochaine rencontre entre le gouvernement et le secrétariat national.
- De procéder au règlement des arriérés de salaires de 130.000 travailleurs du secteur BTPH, et d’envisager le versement des salaires jusqu’à la fin de l’année en cours. Parallèlement, il a été convenu d’activer les travaux d’assainissement et de restructuration des entreprises concernées du secteur pour permettre une relance rapide et durable de leurs activités dès le début de l’année 1995.
- De procéder également au règlement rapide des créances détenues par les entreprises sur les maitres d’ouvrages publics.
- A.Benhamouda commençait à être excédé par la lenteur et la légèreté avec laquelle le gouvernement traitait le dossier des salaires, et il comptait bien le faire savoir à ses partenaires sociaux.
« Nous allons exiger le relèvement du SNMG en rapport avec le coût de la vie. Si nous n’aboutissons pas à un accord, alors ça va barder. »
Ce sont là, les termes utilisés par A. Benhamouda devant les « pétroliers » à la Maison du Peuple le 21 Septembre 1994, jour de la tenue de la conférence nationale des cadres syndicaux du secteur du Pétrole, du Gaz et de la Chimie. Ou bien un accord avec le gouvernement qui rétablit les travailleurs dans leurs droits, ou bien la fin de la trêve sociale avec, au bout du compte, un affrontement direct et généralisé avec tout ce que ceci aurait comme conséquences.
Au nom de l’UGTA, A. Benhamouda avait ainsi signé sa rentrée sociale. Révolution et Travail 28/09/94
Une sérieuse menace de grève générale planait sur le secteur des hydrocarbures et de la chimie, le risque d’explosion persistait dans le bâtiment et les ports. C’est forte de ce mouvement de contestation syndicale d’importance que le Centrale allait négocier le pacte social.
Dans un délai de deux semaines, les vannes nourricières de Hassi Messaoud et de Hassi Rmel, entre autres, allaient être fermées si les grosses sociétés qui étaient SONATRACH, pour les hydrocarbures, et la SNIC, pour la chimie, n’étaient pas reconstituées, ou du moins, si le gouvernement ne s’engageait pas pour le regroupement des 22 entreprises du secteur, à l’époque autonomes, pour reconstituer la Sonatrach et la Snic telles qu’elles étaient avant 1982, date ou les sociétés nationales avaient été restructurées, divisées, le plus souvent en plusieurs entreprises publiques.
Les revendications socioprofessionnelles et la sauvegarde des entreprises publiques, étaient donc, durant la rentrée 94/95, à l’origine de plusieurs conflits de travail. Les plus importants risquaient de paralyser l’ensemble des ports et les entreprises du Bâtiment. Des grèves couvaient aussi à la Banque Centrale d’Algérie, à l’entreprise de gestion aéroportuaire d’Alger, a l’Institut national d’hygiène et de sécurité, à l’Enabos, etc.
Le secrétaire général de l’UGTA réaffirmait sa caution pour toutes les actions engagées par n’importe quelle structure de l’organisation syndicale. (L’Opinion 11/10/94)
Ceci bien sûr allait déranger les plans de beaucoup, donc on accusait A. Benhamouda encore de faire de la politique, et on lui reprochait de toucher à l’intérêt national, comme si l’intérêt national et celui des travailleurs étaient dissociables. Voici ce qu’il répondit donc dans un entretien accordé au quotidien Le Matin dans son édition du 23/10/94 :
l’UGTA sait très bien situer l’intérêt national, son passé est la comme témoignage. Mais en ce qui concerne les hydrocarbures, il faut dire qu’aujourd’hui le débat n’est pas seulement syndical mais éminemment politique. Des questions simples : les hydrocarbures sont-ils un patrimoine national ou celui d’une catégorie donnée ? Une société pétrolière qui est aussi une entreprise stratégique doit-elle être gérée comme une quelconque autre entreprise ? Les entreprises de service du secteur pétrolier sont-elles un acquis de l’Algérie ou un outil qu’il faut lui enlever et briser ? Ces entreprises de service, pour la plupart issues de la restructuration de SONATRACH doivent elles recevoir leur part en devises ? Les entreprises étrangères travaillant avec SONATRACH doivent-elles être payées en devises ou en dinars ? Je cite ces questions au hasard pour qu’on puisse soupçonner ce que cache en réalité un mouvement des travailleurs et une action syndicale dans le domaine des hydrocarbures. C’est l’importance capitale de ces choses-là qui pousse certains à minimiser nos actions dans le secteur pétrolier.…par la grève de l’aéroport, les travailleurs ne revendiquent pas l’augmentation des salaires. Il y a tout un projet de restructuration qui vise à privatiser ce domaine public. Or, nous pensons que la privatisation doit se faire en concertation avec les partenaires sociaux. Depuis vingt-sept mois on parle de doter l’aéroport d’équipements de sécurité, jusqu’à présent rien n’a été fait. Quelle est la priorité ? La restructuration de l’entreprise ou la sécurité des voyageurs ?
La tripartite …
En vue de la préparation de la réunion tripartite exigée par l’UGTA fixée, pour le 28 Octobre 1994, une série de rencontres bilatérales avaient donc réuni successivement le gouvernement avec les organisations patronales du secteur privé, et de l’UGTA, ou les travaux fournis par les groupes mixtes de travail avaient été analysés. Cependant, aucun accord n’avait encore été conclu au sujet des augmentations salariales.
L’augmentation des salaires que nous revendiquons ne relève pas, a notre avis, de l’impossible. On nous dit que les caisses de l’état sont vides. Mais pourquoi ne sont-elles pas vides pour l’importation d’énormes quantités de café que le travailleur paie à plus de 500 dinars le kg ? Pourquoi ne sont-elles pas vides pour l’importation de matériel médical dont le travailleur n’en bénéficie pas et l’importation de médicaments périmés ? Nous assistons à un énorme gaspillage des deniers de l’état. L’augmentation que nous revendiquons peut se faire par le biais d’une réorientation des moyens financiers qui sont en possession de l’état. Et ce n’est pas du tout sorcier pour le faire. Non seulement on pourrait ainsi faire des économies, mais aussi mettre un terme à ce gaspillage criminel engendré par la mauvaise gestion. » A. Benhamouda au quotidien El Watan 26/10/94.
Les 28 et 29 octobre 1994 s’est tenue la tripartite regroupant le gouvernement, le secrétariat national de l’UGTA et les présidents des organisations patronales publiques et privées, au cours de laquelle les points examinés étaient :
- La restructuration industrielle
- Les salaires
- Les mesures sociales d’accompagnement
- Les modalités de concertation
L’UGTA a fit face à de nombreuses oppositions et dû peser de tout son poids pour arracher l’accord tant attendu par les travailleurs. D’autant que les négociations entre le gouvernement et l’UGTA semblaient bloquées des lors que le gouvernement avait initialement proposé une augmentation de 7% que A. Benhamouda considérait comme un mépris à l’égard des travailleurs, et réclamait lui une augmentation de pas moins de 25%.
L’accord final englobait une augmentation des salaires de base de 20% en deux tranches et en deux étapes, ainsi que la revalorisation des pensions et allocations de retraite de 5 à 31% selon trois types de date d’effets de ces pensions/allocations.
Les enjeux du 9eme congrès …
Loin des négociations et tumultes UGTA/Gouvernement, une autre bataille allait bientôt commencer, celle de la succession d’A. Benhamouda à la tête de l’UGTA. Ce dernier avait déclaré qu’il ne voulait pas renouveler son mandat, bien qu’il réunisse un large consensus qui n’allait pas manquer de se manifester lors du congrès pour exiger son maintien.
Tous se demandaient ce qui allait advenir de l’UGTA après le départ de A. Benhamouda. L’hebdomadaire « El Waqt » explique dans un article intitulé « Centrale syndicale, qu’en sera-t-il après le 9eme congres ? », que le 9eme congres allait se tenir dans une tempête d’accusations et de manœuvres orchestrées contre Abdelhak Benhamouda. Ce dernier accusait le FLN de tenter d’utiliser le syndicat pour servir ses objectifs politiques… le parti de Mehri, reprend le journal plus loin, n’a jamais pardonné a A. Benhamouda sa position au lendemain du premier tour des élections législative de 1991, quand le leader du syndicat avait appelé à la formation d’une commission de la sauvegarde de l’Algérie. » (Et qu’il s’était aussi, i faut le rappeler, vertement pris aux participants de la rencontre de Sant ’Egidio à Rome). Mehri avait déclaré alors que l’UGTA n’avait pas à intervenir dans le domaine politique. Le FLN et ses partisans du mouvement Ennahda, Hamas, le parti de Ben Bella, le groupe de Benbaibeche n’avaient pas digéré non plus que le syndicat boycotte la marche du 8 mai, organisée pour le dialogue avec les terroristes, et qui s’est soldée par un échec ». El Waqt poursuit son article : « le FLN veut de toutes ses forces réintégrer la Centrale syndicale. Et pour ce, il faut qu’il écarte de son chemin les partisans de la ligne « benhamoudienne » qui défend le caractère républicain et démocratique de l’Algérie. Dans une réponse aux accusations de l’organe centrale du FLN « EL Moudjahid», l’organe de l’UGTA, « Révolution et Travail » a publié un article pour affirmer : « notre problème n’est pas avec les militants du FIS, du FLN, de Ettahadi ou autres car parmi eux, il y a des travailleurs et des adhérents de l’UGTA. Notre problème, ce sont surtout certains dirigeants de partis dont les actes et les déclarations sont en contradiction avec les intérêts des travailleurs… nous visons plus précisément la direction du FLN qui veut aujourd’hui revenir au pouvoir par le biais du FIS, en utilisant la base du FLN dans son opposition ».
Première organisation syndicale du pays, l’UGTA était déjà devenue une grande force politique, ce qu’il lui a valu d’être attaquée par une partie de la pseudo-opposition pour son engagement politique, Abdelhak Benhamouda, allait donc remettre la question aux mains des congressistes pour trancher.
Ce retour à la base avait le mérite de faire d’une pierre deux coups : régler définitivement le problème, par des amendements statuaires s’il le faut et brouiller les cartes des détracteurs. Ces derniers ne chômaient pas. Le FLN était le premier à attaquer de front l’UGTA. L’ex parti unique, par le biais de son organe centrale El Moudjahid, fustigeait à longueur de colonnes la personne d’Abdelhak Benhamouda avec des termes parfois insultants, souvent diffamatoires. (El Watan 25 Décembre 1994)
Révolution et Travail, publication éditée par l’UGTA à l’époque, se chargeaient très bien de répliquer à ces attaques que A. Benhamouda qualifiait de « manœuvres déstabilisatrices », dans son édition du 13 Décembre, sous le titre : « Pourquoi l’UGTA dérange-t-elle Mehri ? » le journal signifiait au « zaim du FLN » que les travailleurs et leurs familles « ne pardonneront jamais le comportement de celui qui a transformé son parti en véritable « bogato » pour justifier les actes terroristes. »
Les caciques du FLN, appuyés par d’autres cercles extrémistes, n’allait pas s’arrêter en si bon chemin a quelques jours du neuvième congrès.
L’enjeu était de taille. Une organisation forte d’un million et demi d’adhérents ne pouvait laisser nul indifférent dans les cercles du pouvoir. Farouchement opposée aux thèses développées par ces partis conservateurs, l’UGTA constituait un obstacle à éliminer. (Analyse extraite d’El Watan 25 Décembre 1994)
De ce fait, Le 9eme congrès de l’UGTA avait à examiner, traiter et trancher dans plusieurs questions d’ordres organisationnel, social et économique qui allaient être soumises aux larges débats inscrits à son ordre du jour. Parmi ces questions virulentes, Révolution et Travail, organe de l’UGTA, dans son édition No 61 du 27 Décembre 1994, citent les points ci-dessous:
- L’Union Générale des Travailleurs Algériens (UGTA) est-il de son droit de s’occuper de la politique ? quel est le concept de cette politique dont certains prétendent qu’elle est du ressort des partis politiques et que les travailleurs et leur syndicat n’ont pas le droit de s’en mêler ?
- Les délégués au congrès auront à se positionner envers la « Direction » d’un parti politique ou, plus précisément, un groupe d’individus qui a régné au pouvoir pendant une décennie et qui a conduit le pays à la faillite, à l’époque où les recettes de l’Algérie s’élevaient à 17 milliards de dollars pour vingt millions d’habitants. Malgré ces facteurs favorables, ces individus nous ont laissé un endettement de 26 milliards de dollars, et voilà qu’ils se disent aujourd’hui capables de gérer les affaires du pays avec seulement 8 milliards de dollars comme revenue national et une population avoisinant les 30 millions.
- Quelle serait la position des travailleurs, par le biais de leurs représentants au congrès, envers ces partis politiques dont les programmes sont en contradiction flagrante avec les intérêts de la classe ouvrière ? par exemple, comment les travailleurs comptent ils réagir devant les formations politiques qui appellent, dans leurs programmes, a la liquidation des entreprises publiques, àla mise au chômage des milliers de travailleurs, a l’arrêt de la construction du logement social, à l’ouverture de nos frontières terrestres, aériennes et maritimes au commerce extérieur, a la dissolution des syndicats, etc…
- Comment les travailleurs se considèrent-ils ? sont-ils de simple « Ghachi » (peuplade) composés de « moutons » qui se feront conduire par les barons du système vers les « abattoirs » ou sont-ils vraiment des êtres-humains ayant le droit d’être concerté pour donner leur point de vue quant à l’élaboration du projet de société.
Que voulait l’UGTA….Projets et résolutions du 9eme congres
Que voulait l’UGTA ? – Réintroduire les travailleurs dans la lutte politique, – mettre fin à leur marginalisation, a la sous-estimation de leur poids politique. – En faire un interlocuteur et un acteur incontournable de la vie économique et sociale dans un contexte marqué par les difficultés et crises multiples que vit l’Algérie.
Le 9eme congrès de l’UGTA entamait ses travaux dans un contexte encore plus compliqué que le précédent congrès. A. Benhamouda proposait aux congressistes une ligne politique et syndicale « dure ».
- Au plan politique les participants allaient être sollicités pour adopter une démarche de longue haleine correspondant à l’analyse de la situation et ses enjeux à moyen terme. En substance, s’inscrivant dans le camp du progrès et de la modernité, l’UGTA réaffirmait son engagement dans la lutte pour la démocratie dans un cadre général d’autonomie des forces politiques et sociales. Il était important pour l’UGTA d’être le premier à en définir les contours plus précisément et plus concrètement. Par ailleurs, le fait que ce soit les travailleurs qui procèdent à ces bilans de la transition vers la démocratie aller faire que les autres forces politiques auront à en tenir compte dans l’avenir.
- Au plan syndical, l’UGTA allait tenter de se lancer dans un combat, pied à pied, sur tout le territoire national, pour réviser des conventions collectives imposées dans un contexte général défavorable aux travailleurs. (L’Hebdo Libéré No 196 du 28 Décembre 1994 au 03 Janvier 1995).
Mais avant de revoir les projets et résolutions du 9eme congrès, voyons d’abord si A. Benhamouda et ses compagnons avaient réussi à réaliser les objectifs et les attentes émises lors du 8eme congres qui les a vu élire à la tête de l’UGTA.
Bilan du 8eme mandat …
Depuis 1990, le secrétariat national de l’UGTA avait conclu avec les différents gouvernements 16 accords. Soit une moyenne de 4 accords par an. Les plateformes de négociation gouvernement UGTA portaient, entre autres, sur:
- Le pouvoir d’achat
- La protection sociale (sécurité sociale-retraite-patrimoine de la sécurité sociale-médecine de travail-hygiène et sécurité)
- L’assainissement financier des entreprises
- La caisse nationale de chômage
- La sauvegarde de l’emploi des jeunes
- Les mesures de lutte contre l’inflation
- L’application des décisions de justice
- La réorganisation du secteur public
- La refonte de l’administration (fonction publique)
- Les œuvres sociales dans la fonction publique
- Révision des lois sociales de 1990
- Les conventions collectives
- Les entreprises de BTPH, EPL et d’autres thèmes touchant le monde du travail….
Comment ceci se traduit en termes d’acquis sociaux et concrétisation des recommandations du 8eme congrès de l’UGTA ? Les 8emes assises avaient commandé d’atteindre les objectifs suivants :
- SNMG a 4000 DA : objectif atteint.
- Constitution de la Fédération Nationale des Retraités : objectif atteint
- Réorganisation de la Sécurité Sociale et la Caisse de Retraite : objectif atteint ; les conseils d’administration des deux caisses étaient composées d’une majorité représentant l’UGTA.
- Création d’une Caisse Nationale de Chômage : objectif atteint ; cette concrétisation avait fait l’objet d’une négociation avec quatre gouvernements. En luttant pour la création de caisses, l’UGTA avait pour souci majeur de protéger les travailleurs et d’amener les employeurs à ne pas considérer les compressions d’effectifs comme une finalité et respecter les règles et obligations. Dorénavant, tout employeur ne pouvait compresser sans payer les droits d’entrée.
- Mise en place d’un Conseil Economique et Social (le CNES): objectif atteint, l’UGTA disposait de 30 représentants dans ce conseil.
- Détachement des élus : une circulaire gouvernementale relative aux facilitations syndicales avait été obtenue et mise en pratique depuis juillet 1992.
- Augmentations salariales : depuis Octobre 1990, la moyenne des augmentations salariales avec indemnités et primes négociées et obtenues par l’UGTA était de l’ordre de 7500 DA.
- Conventions Collectives : 692 conventions avaient été enregistrées couvrant un effectif de 751.000 travailleurs environ.
- Règlements Intérieurs : 1955 règlements intérieurs avaient été enregistrés couvrant un effectif de 1.300.000 travailleurs environ.
- Comités de Participation : 670 comités de participation avaient été enregistrés couvrant un effectif de 542.000 travailleurs environ.
- Les activités en faveur du BTPH et des entreprises publiques locales : les données sur la situation sociale faisaient ressortir que les secteurs les plus touchés par la crise que connaissait le pays, étaient incontestablement le secteur du BTPH, et celui des entreprises publiques locales. Lors des premières négociations avec le gouvernement en Octobre 1990, l’UGTA déterminait ainsi sa démarche revendicative en intégrant la situation alarmante du secteur BTPH, par voie de conséquence, les préoccupations des travailleurs des entreprises de ce secteur, s’inscrivant ainsi dans la prise en charge des problèmes de ce secteur, et la mise en œuvre des moyens devant déterminer sa relance. Cette démarche était en totale contradiction avec le programme du gouvernement de cette époque. Il a fallu attendre septembre 1991, suite à une situation de quasi-cessation de paiement des entreprises du BTPH et du secteur public local, pour que les actions initiées par l’UGTA trouvent leur concrétisation dans l’accord Gouvernement-UGTA du 21 septembre 1992 qui dictait des mesures concrètes en faveur des entreprises du BTPH et des EPL en s’inscrivant dans un processus d’assainissement, de réorganisation et de relance de ces secteurs.
La situation de 1098 entreprises publiques locales a été examinée.
Le dossier a été finalisé et déposé aux fins de prise en décision en septembre 1994.
La tenue des 9emes assises nationales de l’UGTA sous l’appellation « Congrès du Chahid Belaid Meziane » traduisait la fidélité des travailleurs et des syndicalistes aux idéaux et principes pour lesquels ont lutté et se sont sacrifiés les patriotes et les nationalistes morts pour la patrie, du Chahid Aissat Idir à Belaid Meziane ainsi que tous les martyrs de l’Algérie. Ces assises, s’étaient soldées par un nombre important de résolutions et de changements dans les statuts de l’organisation, qui allaient lui donner une plus grande flexibilité dans ses différentes actions pour la protection et la promotion du travailleur algérien et de son outil de travail.
Ci-dessous, quelques extraits des résolutions les plus importantes adoptées lors de ces 9eme assises (Statuts et Résolutions adoptés par le 9eme congrès national, 27, 28, 29 et 30 Décembre 1994, Publication de Révolution et Travail)
Résolution organique :
A la lumière des expériences passées et compte tenu des aspirations des travailleurs, à savoir conférer davantage de cohésion et de force à leur organisation syndicale, l’UGTA, afin qu’elle puisse poursuivre sa mission de défense de leur cause, leurs libertés syndicales et leurs droits sociaux.
Dans le souci de doter l’Organisation syndicale d’outils organiques viables (structures et instances), de définir les modalités de leur élection ainsi que les paramètres fondamentaux devant garantir sa pérennité.
Le 9eme congrès avait adopté la présente résolution organique, laquelle renferme les volets ci-après (texte entièrement repris du document Statut et Résolutions Adoptés par le 9eme congrès national, édité par Révolution et Travail) :
- Définition de l’UGTA
- Place de l’UGTA dans la société : …. Au regard de la situation difficile que traverse le pays, l’UGTA est appelée à assumer des responsabilités historiques qui lui imposent de s’affirmer en tant que force nationale pour garantir équilibre et stabilité à la société. L’UGTA n’ambitionne nullement le pouvoir à l’heure actuelle. Toutefois, cette attitude ne l’empêche pas pour autant d’investir le champ politique. Bien au contraire, le poids de la classe ouvrière algérienne qu’elle représente lui confère un rôle déterminant et influant dans l’orientation de la politique du pays et l’esquisse d’un projet de société. Tout projet politique et tout programme de parti qui ne tiennent pas compte de cette réalité, se trouveront confrontés à une force sociale organisée capable à tout moment de mobiliser ou de paralyser la société, si d’aventure ses intérêts et ceux du pays sont menacés ou remis en cause.
- Rôle de l’UGTA dans la réalisation de l’unité des travailleurs
- Choix des directions au niveau des structures : … saisir l’opportunité du 9eme congrès pour imaginer des règles et des paramètres organiques en matière d’accès aux responsabilités syndicales (critères, itinéraire, graduation, alternance, etc…).
- Organisation des travailleurs : au lendemain de l’indépendance, la force organique et organisationnelle de l’UGTA devait s’appuyer sur les travailleurs du secteur public, qui constituaient un pilier fondamental dans son organisation. Les changements intervenus dans l’édifice économique imposent aujourd’hui à l’Organisation syndicale la conception et la recherche d’instruments organisationnels qui permettent de structurer les travailleurs du privé. De toute évidence, cette option doit être inscrite parmi les priorités dans le programme organique des structures syndicales.
- Modes d’élections libres et démocratiques : il a été donné de constater que les structures actuelles ne se sont pas encore départies des anciens procédés qui ne répondent plus à ceux prônés par l’Organisation syndicale, laquelle a adopté depuis son 8eme congres une nouvelle ligne de conduite, d’une organisation de masse elle s’est érigée en syndicat revendicatif, ce qui implique une rupture radicale avec les anciens concepts, mentalités et méthodes qui ne portent plus ou qui ont montré leurs limites. Pour ce faire, il y a lieu d’envisager et d’adopter de nouveaux modes d’élections qui soient libres, démocratiques et à la discrétion des travailleurs.
- Organisation des structures et instances et définition de leurs relations : l’ossature de l’UGTA repose sur deux structures, l’une horizontale et l’autre verticale. Leur action est complémentaire avec pour objectif l’unité des travailleurs et la défense de leurs intérêts et droits matériels et moraux. Toutefois, cette complémentarité gagnerait à être développée et rénovée selon des paramètres viables. Il s’agit, entre autres, d’associer la structure verticale à l’œuvre d’élargissement de la base syndicale, en coordination avec la structure horizontale. Cette option aura le mérite de servir le mouvement syndical, de prendre en charge effectivement et dans la pratique, les questions posées et de répondre aux attentes des travailleurs.
Résolution Formation, Information, Communication :
Le 9eme congres souligne la nécessité, pour l’UGTA, d’inscrire parmi ses actions prioritaires la formation et l’éducation ouvrière, par la réhabilitation et la redynamisation des collèges de formation syndicale ainsi que par l’établissement d’un plan en la matière. Les mutations économiques intervenus et les changements attendus imposent aux militants syndicaux et aux cadres de l’Organisation une connaissance exhaustives et une maitrise parfaite des questions liées au dispositif législatif régissant le monde du travail en particulier et l’économie nationale en générale.
Résolution économique et sociale :
Pour l’UGTA, l’entrée dans l’économie de marché impose une phase de transition à préparer minutieusement afin de permettre la meilleure forme d’insertion possible de notre économie dans le marché mondial.
En conclusion, pour l’UGTA, c’est la gestion des années 80 et ce qui s’en suivit d’anarchie dans la conduite des affaires du pays qui ont amené le pays à rééchelonner sa dette.
L’UGTA s’est toujours prononcée contre toute politique, approche ou démarche favorisant le rééchelonnement.
Pour sa part, et quand bien même opposée à cette option, l’UGTA n’a ni la latitude ni le pouvoir d’empêcher l’exécutif de recourir au rééchelonnement.
En revanche, il appartient à la centrale syndicale d’arrêter une stratégie alternative pour faire face aux effets nés ou attendus du rééchelonnement. Cette stratégie s’articule autour de deux actions :
- S’employer à empêcher le FMI de faire main basse sur les potentialités du pays et d’en hypothéquer l’avenir.
- Engager des négociations multiformes avec le gouvernement aux fins d’atténuer les effets négatifs du rééchelonnement sur la classe ouvrière algérienne.
Dans le volet de l’emploi l’UGTA constate que
Le pays est un immense cimetière de moyens de transports, d’équipements et d’engins dont pâtissent les citoyens, les travailleurs et les activités stratégiques des secteurs de l’agriculture et du BTP.
Le bureaucratisme, le laxisme, l’utilisation du patrimoine des entreprises à des fins personnelles font des ravages.
N’est-il pas grand temps de mettre fin à cette situation ?
C’est pour ces raisons que l’UGTA, a prôné dans l’axe économique, la nécessité de plans de redressement des entreprises, dans le prolongement d’un appel pour la création de comités de redressement, mal appréciés par le syndicat de Directeurs Généraux des Entreprises passées à l’autonomie.
Mais ce n’est pas pour autant que l’UGTA abandonnera la lutte pour le redressement des entreprises en exigeant sa participation pour la mise en œuvre de cet objectif patriotique auquel il faut conférer un caractère obligatoire et en faire assumer la charge collective à la direction et aux représentants des travailleurs.
Pour l’UGTA, il ne fait aucun doute que le redressement est un levier stratégique au service de la préservation et de la création de l’emploi.
Elle ne soulignera jamais assez l’importance à accorder aux investissements de valorisation du potentiel productif existant (IVPE)
Elle demande la tenue d’une conférence nationale sur l’emploi avec la participation de l’ensemble des secteurs et des acteurs concernés, en vue de mettre au point une politique à moyen et long terme en la matière.
Dans le volet pouvoir d’achat:
L’UGTA refuse la fatalité des mécanismes du marché qui voudrait, et c’est le plus facile comme le plus injuste et le plus révoltant, encadrer les salaires pour les modifier autoritairement, laisser les prix s’envoler, mettre en œuvre une politique fiscale inacceptable…
C’est pourquoi l’UGTA propose la création d’un observatoire près de l’Institut National du Travail qui devra en liaison avec les partenaires sociaux assurer la charge :
De surveillance de l’emploi
De suivi de l’évolution des prix et des salaires
De la gestion d’un budget familial type et de manière plus générale des principaux indicateurs de l’évolution de la conjoncture économique et sociale.
Par ailleurs, l’UGTA exige un SNMG a 15.000 DA avec une indexation des salaires sur les prix.
Les résolutions adoptées lors du 9eme congrès avaient exigé aussi la revue du cadre général des relations de travail et les instruments de leur application, notamment :
- tout ce qui concerne la prévention et la gestion des conflits collectifs de travail,
- que la justice soit égale pour tous, et l’exécution des décisions de justice rendues en faveur des travailleurs,
- une meilleure prise en charge de l’hygiène, de la sécurité et de la médecine du travail sur le plan législatif et réglementaire et aussi à travers, entre autres, la réactivation de l’Office National de la Médecine de Travail (ONIMET) en fixant ses attributions,
- le redressement de la sécurité sociale (plusieurs propositions ont été faites à ce sujet qu’il serait difficile à résumer en quelques points).
- L’Inspections de Travail, la justice de travail, le logement social, les catégories sociales vulnérables, notamment le problème de la femme qui pour l’UGTA devait faire l’objet d’un examen sérieux, ainsi que la question de la jeunesse qui constituait à elle seule un redoutable défi.
Dans le volet des relations internationales et de l’émigration:
Afin de consolider la place et le rôle de l’UGTA au plan international, le 9eme congrès soutiendra le rôle de l’UGTA au sein de l’USTMA et de la CISA, pour imprimer un nouvel élan et une plus grande dynamique à ces deux organisations, et œuvrera aussi pour renforcer la présence de l’UGTA dans l’action syndicale africaine dans le cadre de l’OUSA et pour consolider cette présence au sein des organisations syndicales internationales en érigeant, notamment, l’OTI en un véritable forum de défense des droits et libertés syndicaux et ouvriers.
Considérant l’importance que l’UGTA a toujours témoignée aux questions intéressants l’émigration et la communauté émigrée, le 9eme congrès mettra au point plusieurs résolutions pour une meilleure protection des droits des travailleurs émigrés, notamment en renforçant les domaines de coopération et de coordination dans un cadre maghrébin en vue de la défense des droits des émigrés.
- A.Benhamouda fit du 9eme congrès de l’UGTA un évènement historique, un pari réussi dans toutes ses dimensions. « .. Il faut préparer le 9eme congrès pour le 4eme trimestre de cette année avec la contribution de toute la base syndicale pour arrêter un programme. Il faut introduire le pluralisme à l’intérieur de l’UGTA, avec des listes de candidatures, des débats, avec une campagne électorale légale, loin des intrigues des coulisses. Il faut que chaque candidat puisse se battre face à son adversaire. » L’Hebdo Libéré du 27 au 03/05/94. C’était sa vision du 9eme congrès et il l’avait bien réalisée.
Les attentes du 8eme congres avaient été plus qu’atteintes, les projets et résolutions qui allaient donner un nouveau souffle au syndicalisme algériens avaient tous été adoptés, et l’évènement lui-même avaient grandement fait parler de lui à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Algérie. A. Benhamouda avait choisi de faire de cet évènement une rencontre internationale, en invitant un nombre important de délégations syndicales étrangères, arabes et occidentales. Malgré l’insécurité et l’acharnement des medias étrangers à noircir l’image de l’Algérie, A. Benhamouda réussit à redorer le blason de l’Algérie et de relancer le syndicalisme algérien sur la scène internationale. Le professionnalisme, l’excellente organisation, la richesse les débats, et la transparence des élections faisaient que l’UGTA était la seule organisation réellement disciplinée dans le pays, et tous lui devaient respect. Plus de détails concernant la campagne d’A. Benhamouda sur le plan international peuvent être consultés dans le chapitre Son Combat a l’International.
Malgré son intention affichée à plusieurs occasions de ne pas se porter candidat pour un nouveau mandat à la tête de l’UGTA, ses compagnons le représentèrent, et comme lors du 8eme congrès, il sera porté candidat sans son accord, et élu par la quasi majorité des représentants syndicalistes pour un deuxième mandat. Ce deuxième mandat que A. Benhamouda ne voulait pas, de peur que les attaques qu’il subissait de toutes parts allait nuire à l’UGTA, l’organisation pour laquelle il avait tant donné, et qu’il voulait être indépendante et sous aucune tutelle ou influence, même la sienne :
.. Non je ne serai pas candidat. J’ai été élu lors d’un congrès et ma mission s’arrête au prochain…. L’Algérie va connaitre des maintenant un grand débat politique. Et moi si je reste à la tête de l’UGTA, je vais l’engager dans ce débat politique en sachant que des gars veulent utiliser Benhamouda pour détruire l’UGTA. Alors je ne serai pas le marteau-piqueur qui va servir à cette sale besogne. Le Soir 12/05/94.
Ce deuxième mandat, A. Benhamouda n’allait pas l’achever, car, c’est lui qu’on achèvera le 28 Janvier 1997.